Baptiste Lac et François Miquel ont ouvert le Comptoir des Cybermonnaies fin Octobre 2018, à Bordeaux. Il s’agit de la première boutique de ce genre en Nouvelle-Aquitaine, même si la pratique existe déjà sur Paris, avec la Maison du Bitcoin entre autres. Ripple-France est allé discuter avec ces deux courtiers en crypto-monnaie. Bonne lecture !
- Peut-on en savoir un peu plus sur cette passion, comment elle est née, ce qui vous a poussé à vous y intéresser de plus près, etc ?
Nous nous sommes tous les deux intéressés au sujet par l’angle de l’innovation technique, avant de nous intéresser aux aspects économiques de Bitcoin.
La création d’une unité d’échange numérique, aux mains d’aucune entité autre que ses utilisateurs, purement décentralisée est un changement de paradigme évident.
Bitcoin est également un changement de paradigme d’un point de vue économique. En effet, pour la première fois, l’humanité a à disposition un medium d’échange de valeur universel, non censurable, accessible à tout un chacun sans autorisation préalable, sans besoin de confiance en un tiers, et pouvant potentiellement faire office de réserve de valeur, autrement dit, de l’or numérique.
A l’instar d’Internet qui a entraîné de nombreux changements sociétaux, nous avons la conviction que Bitcoin va transformer la société, et ce bien au-delà des activités monétaires et financières. Il est donc passionnant de suivre de près son essor.
- Qu’est-ce qui vous a décidé à vous lancer et ouvrir ce comptoir ?
Nous avons été amenés à accompagner à titre personnel de nombreux néophytes dans cet écosystème complexe.
Nous avons donc été confrontés aux multiples questionnements, erreurs opérationnelles et divers problèmes rencontrés par nos amis. Passionnés par le sujet, nous passions également déjà beaucoup de temps à en parler autour de nous.
Forts de ces expériences personnelles et compte tenu de notre conviction sur l’avenir de Bitcoin et des protocoles à blockchain et de la complexité du sujet, nous sommes convaincus que l’existence d’interlocuteurs physiques, en tant qu’intermédiaires de confiance, est nécessaire pour accompagner et dispenser les bonnes pratiques auprès du grand public.
- Si vous pouviez décrire le Bitcoin en quelques mots, qu’en diriez-vous ?
En quelques mots : de l’or numérique doté de son propre système de paiement international !
Le protocole Bitcoin est avant tout une innovation technique : un ingénieux assemblage de technologies permettant de résoudre un problème informatique, le problème des généraux byzantins (https://viresinnumeris.fr/probleme-generaux-byzantins/).
De cette innovation technique, naît un nouvel objet économique : un médium d’échange de valeur, purement numérique, qui respecte des règles (un protocole) définies exclusivement par la communauté d’utilisateurs.
Cet objet numérique s’échange sur un réseau décentralisé, dans lequel chaque participant a le même pouvoir décisionnel qu’un autre. Aucune entité ne peut en prendre le contrôle. Ce réseau est dit résistant à la censure, sans permission et sans besoin de confiance en un tiers.
- Vous travaillez principalement avec le trading de BTC, mais quels sont les autres tokens pour lesquels vos clients viennent principalement vous voir ?
La grande majorité de notre clientèle souhaite acquérir du Bitcoin qu’elle prévoit de conserver sur du moyen-long terme.
Ethereum et XRP suscitent également beaucoup d’intérêt dû à leur notoriété dans l’écosystème.
- En général, comment se déroule un rendez-vous dans les grandes lignes ?
Notre rôle consiste avant tout à renseigner le client, puis à l’accompagner, à lui simplifier le processus d’achat/vente, à lui éviter tout risque opérationnel et à lui prodiguer les bonnes pratiques en termes de conservation et de sécurité.
Il faut savoir que stocker ses crypto-actifs chez un prestataire entraîne des risques de contrepartie significatifs : la liste d’entreprises s’étant faites piratées ou tout simplement parties avec les fonds de leurs clients est déjà longue. Nous accompagnons donc dans un premier temps le client dans le choix et la mise en place de la solution de conservation afin qu’il soit pleinement propriétaire de ses actifs en se passant d’un tiers de confiance. Le choix est dépendant de différents critères, notamment les montants en jeu et la durée de conservation souhaitée.
Nous procédons ensuite à la création de sa fiche client. Une pièce d’identité en cours de validité est nécessaire pour cela.
Nous récupérons alors une adresse de réception du crypto-actif désiré, issue du portefeuille contrôlé par le client, sur laquelle seront livrés les tokens achetés.
Nous émettons alors une simulation, récapitulant en détail l’opération à venir. Le client procède alors au paiement, par carte bancaire ou virement. Dès réception des fonds nous exécutons l’opération et les tokens sont envoyés sur son portefeuille.
À noter que nous ne faisons pas de conseil en investissement. Même si nous avons une forte conviction sur l’avenir de Bitcoin, nous ne prétendons pas connaître les mouvements du prix à venir, a fortiori sur les autres crypto-actifs.
- Quelle a été votre plus grande difficulté jusqu’à présent ?
Nous avons dédié beaucoup de temps et d’énergie au développement d’une solution de gestion de caisse dédiée à ce type d’activité. Elle permet de gérer le suivi client (en conformité avec la réglementation en vigueur), la préparation des commandes et leur bonne exécution, le traitement comptable et la facturation en bonne et due forme.
- Selon vous, quelles sont les prochaines grandes étapes dans l’univers de la crypto ?
L’univers de la crypto évolue à grande vitesse. Si le marché a été baissier en 2018, l’écosystème a lui continué à se développer et à se professionnaliser.
Nous nous félicitons de l’évolution du cadre réglementaire de cette activité, dans le monde et notamment en France, car elle est un prérequis à l’émergence de ce marché et de nouveaux services associés. L’existence d’un cadre juridique clair permet aux acteurs sérieux de se développer et rassure les clients, existants et potentiels. Une régulation en bonne et due forme permet aussi l’entrée sur le marché d’investisseurs institutionnels apportant des liquidités.
Nous considérons que la démocratisation de l’usage du Lightning Network (un système de paiement en bitcoins pouvant rivaliser avec des Visa ou Paypal en termes de volumes et de coût de transactions) peut favoriser l’adoption de Bitcoin comme moyen de paiement, voire même générer de nouveaux usages tels que les micropaiements.
Enfin, l’avènement de cryptomonnaies privées telles que le Libra de Facebook ou le Gram de la messagerie Telegram sont également à suivre.
Bien que le Libra ne soit pas un produit d’investissement, car stable dans le temps, il contribue à populariser et crédibiliser le concept de Bitcoin et des cryptomonnaies en général.
- Pensez-vous que dans un avenir proche ou un peu plus lointain, nous serons amenés à ne plus du tout utiliser les fiat, au profit des crypto ?
Bitcoin est une infrastructure monétaire et financière indépendante, se suffisant à elle-même et dé-corrélée des produits financiers traditionnels.
Pour autant, Bitcoin n’a pas vocation à remplacer les monnaies étatiques et nous ne pensons pas qu’il le fera. Bitcoin existera conjointement avec elles et sera vraisemblablement utilisé là où il se montrera plus efficient, notamment en tant que réserve de valeur (or numérique) ou pour effectuer des règlements à l’international (plus rapide, moins coûteux et permettant de se passer du dollar et par voie de conséquence de s’affranchir des lois extraterritoriales américaines).
- À votre avis, qu’est-ce qui fait qu’actuellement beaucoup de personnes soient réticentes envers le bitcoin, et surtout envers les cryptomonnaies de manière plus générale ?
Entre autres, nous pouvons citer deux raisons :
- La complexité du sujet : l’humoriste américain John Oliver a une formule amusante concernant Bitcoin : « Bitcoin c’est tout ce que vous ne comprenez pas à la monnaie, combiné à tout ce que vous ne comprenez pas à l’informatique ».
C’est effectivement un sujet vaste et complexe, qu’il n’est pas évident d’appréhender compte tenu des différents changements de paradigmes qu’il implique. - Le traitement médiatique : les médias généralistes lui ont fréquemment fait une mauvaise réputation, en l’associant, très et trop souvent, aux places de marché de la drogue, qui représentent pourtant aujourd’hui moins de 1% des transactions Bitcoin, ainsi qu’à sa consommation électrique, qui est un sujet plus nuancé que la façon dont il est traité dans les articles grands public.
- Que diriez-vous à quelqu’un qui n’a jamais investi, mais qui souhaite se lancer dans l’aventure ? Par où devrait-il commencer, quels seraient les bons gestes pour éviter les plus gros écueils ?
Avant d’investir, il est bon de comprendre ce dans quoi vous souhaitez investir. Nous recommandons au client de se renseigner et de se documenter afin de comprendre ce qu’est Bitcoin. Cela permet d’avoir une vision long terme et d’être émotionnellement moins sensible aux mouvements de prix.
Ensuite, se faire accompagner peut lui éviter des difficultés, des erreurs… Notre Comptoir est par exemple un facilitateur pour interagir avec l’univers et le marché des crypto-actifs.
- Recommanderiez-vous à tout investisseur d’avoir recours à l’expertise de professionnels comme vous ? Est-ce risqué de pratiquer le trading seul ?
Il faut distinguer l’investissement de la pratique du trading.
Le trading est un métier à part entière, de la spéculation à court/moyen terme, qui est loin d’être une source de revenus facile.
Nous proposons d’ailleurs une formation d’initiation au trading, activité qui attire de nombreux crypto-enthousiastes. Cette formation a pour but de présenter les bases, prodiguer les bonnes pratiques à mettre en œuvre afin d’éviter de tomber dans des pièges et de commettre de fréquentes et coûteuses erreurs de débutant.